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Tout est parti d’une vidéo datant de 2021 qui a ressurgi sur les réseaux sociaux fin juillet. On y voit J. D. Vance, l’actuel colistier de Donald Trump, déclarer sur Fox News que les Etats-Unis seraient dirigés par « des femmes à chat sans enfant malheureuses » (« a bunch of childless cat ladies who are miserable at their own lives »), n’ayant pas d’« intérêt direct » au bien du pays, puisque sans enfant. Des propos vivement critiqués par les partisans de son opposante, Kamala Harris, qui elle-même n’a pas d’enfant, directement visée par ces attaques. En soutien, la chanteuse Taylor Swift s’est définie elle aussi comme une « childless cat lady » dans le post Instagram dans lequel elle a annoncé soutenir la démocrate.
J. D. Vance n’est pas le premier à utiliser cette expression misogyne. Comme l’explique Charlotte Debest, docteure en sociologie et autrice de la thèse Le Choix d’une vie sans enfant (2014, Presses universitaires de Rennes), l’expression « childless cat lady » est proférée à l’encontre des femmes depuis des siècles, notamment pour dénigrer leur engagement sur la scène politique.
« Childless cat lady » peut être traduit littéralement par « femme à chat sans enfant ». En français, on parlerait de « vieille fille à chat », sous-entendu une femme célibataire, hétérosexuelle, seule, potentiellement aigrie, en tout cas pas suffisamment aimable pour être entourée d’autre chose que de son animal de compagnie. Qui dit « vieille fille » dit non mariée et donc sans enfant. Quant au chat, il a été associé à la femme pour son côté domestique et passif : c’est un animal qu’on peut garder à l’intérieur de la maison, qu’on peut rendre invisible, contrairement au chien, associé à l’homme, qui a besoin d’intégrer l’espace public. A l’origine on utilisait plutôt l’expression « cat lady ». Le terme « childless » (« sans enfant ») ajoute un discrédit supplémentaire, sous-entendant que cette situation serait forcément triste et dommageable.
Dans la mythologie égyptienne, les chats étaient au contraire associés à la divinité et à la déesse Bastet, la fille du dieu soleil Rê, qui avait la forme d’une chatte ou d’une femme à tête de chat. Elle représentait la bienveillance, la protection de l’humanité mais aussi la féminité et la fertilité. Les femmes de pouvoir ont peu à peu disparu et la figure du chat s’est détériorée, devenant associée à la sexualité débridée, au vice et au mal. Le chat étant aussi un animal indépendant, il renvoyait à quelque chose d’indomptable, créant ainsi de la peur à une époque où l’Eglise était devenue très puissante pour contrôler la sexualisation et le corps des femmes.
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